Répondant à René Pallincourt, président de la FNAIM (Fédération nationale des agents immobiliers), qui lui récapitulait comme il est d'usage dans son discours de clôture du congrès annuel de cette organisation les doléances de la profession - discrimination fiscale de l'immobilier ancien par rapport au neuf, crainte de nouveaux traitements de faveur vis à vis des locataires susceptibles de les déresponsabiliser au risque de décourager les bailleurs privés, discriminations entre agents immobiliers et notaires, réforme trop timide de la réglementation de l'exercice des professions d'agent immobilier et administrateur de biens, maintenant encore trop de tracasseries inutilement vexatoires... -, le ministre délégué au logement et à la ville, Marc-Philippe Daubresse, a procédé une nouvelle fois à la défense et illustration de la politique du gouvernement et a fait un point complet des réformes engagées ou annoncées, reconnaissant au passage que la première année de son action au ministère dans le cadre de l'équipe Borloo avait été surtout consacrée à la préparation du Plan de cohésion socale car 'il y avait le feu" et qu'il fallait d'abord "éviter la révolution"...
- effort en faveur du parc privé pour la remise sur le marché locatif de logements anciens : si dans le budget 2005 le parc public reçoit plus de crédits nouveaux que l'ancien, c'est de peu (80 millions d'euros pour le public contre 70 pour l'ancien), la tendance devrait s'inverser en 2006 (140 millions pour le privé contre 120 pour le public)...
- sécurisation du risque locatif des bailleurs : déjà le gouvernement a accepté un amendement au projet de loi de programmation pour la cohésion sociale (1) prévoyant que les créances de logement des personnes victimes de surendettement seraient réglées prioritairement aux autres ; par ailleurs, il confirme étudier un fonds de garantie pour les logements conventionnés du secteur privé (logements loués avec plafonds de ressources et de loyers), financé par la CRL (contribution sur les revenus locatifs, qui permettrait de "mutualiser les risques locatifs de ceux qui louent leurs logements à des ménages modestes" ; mais promis : ce ne sera pas une "CLU" (Couverture logement universelle) et pas question de supprimer le dépôt de garantie (référence au tollé bien orchestré qu'avait soulevé dans le milieu des administrateurs de biens et des défenseurs des propriétaires privés le projet de Marie-Noëlle Lienemann, dernière ministre du logement du gouvernement Jospin...) ! Pas question non plus d'interdire les expulsions dans le parc privé, pas plus que dans le parc public : le dispositif de prévention des expulsions dans le parc social, qui a été caricaturé, ne concernera que ce dernier et vise surtout à maintenir l'aide personnalisée au logement des locataires de bonne foi et solvables...
- reconnaissance du rôle social pouvant être joué par le parc locatif privé : le plan de cohésion sociale prévoit une variante "très sociale" du régime fiscal d'incitation à l'investissement locatif privé dans le neuf, l' "amortissement Robien", avec un taux de déduction forfaitaire de 40% en plus de l'amortissement...
- confirmation de l'extension du prêt à taux zéro (PTZ) à l'ancien (notre brève), même s'il a fallu, pour le faire adopter à des députés hostiles, inquiets depuis le début des risques inflationnistes, et éviter qu'ils rétablissent une condition de travaux, accepter une "petite" décote par rapport au neuf...
- déblocage de la réforme des charges récupérables : on sait que des jurisprudences de la Cour de cassation font peser depuis deux ans des risques sérieux pour les bailleurs de voir contester par des locataires une part importante des charges récupérables qu'ils leurs réclament : charges de gardiens, charges de nettoyage quand celui-ci est réalisé par une entreprise, etc. (notre article) ; le décret du 26 août 1987 doit manifestement être réécrit, mais la concertation s'était enlisée... C'est promis, le dossier est sur le bureau du ministre qui va s'en occuper ! En attendant, deux mesures ont été introduites par amendement : le délai de prescription de l'action en "répétition de l'indû" (en clair l'action que peut engager le locataire pour se faire rembourser du trop payé de charges ou de loyers) est ramené de 30 ans à 5 ans, et en fait aligné sur le délai qu'a le propriétaire symétriquement pour demander le paiement de loyers et charges qu'il a omis de réclamer ; par ailleurs, il pourra être dérogé par accord collectif à la liste des charges dont la récupérabilité est autorisée par le décret qui est à réécrire...
- réforme de la réglementation de l'exercice des professions d'agent immobilier et administrateur de biens : après la réforme par ordonnance de la loi du 2 janvier 1970, dite « loi Hoguet » (notre brève), le plus délicat reste à faire : la réforme du décret d'application, à savoir le décret du 20 juillet 1972... C'est en effet sur ce plan que le ministre est le plus attendu, les professionnels craignant qu'une réforme trop timide ne les oblige à patienter encore de longues années avant la libéralisation qu'ils appellent depuis longtemps de leurs voeux ; or les assurances du ministre ont été bien évasives, proposant de débloquer sans attendre les mesures qui ne font pas problème - acceptation des paiements par carte bancaire, informatisation des registres légaux principalement - et report à une discussion ultérieure les sujets sur lesquels le ministère de la justice semble s'arc'bouter...
- confirmation du report au 1er janvier 2006 nouvelles règles comptables des copropriétés et de l'abandon du principal aspect contesté aussi bien par les copropriétaires que par les syndics, à savoir les quatre comptes par copropriétaire (notre article)... Par contre, par amendement de dernière minute dans le projet de loi de programmation pour la cohésion sociale, les organisations de défense des copropriétaires semblent avoir réussi à faire passer une mesure qui leur tenait à coeur, à savoir la dispense d'application des nouvelles règles comptables pour les "petites" copropriétés ! Les professionnels vont probablement faire grise mine dans la mesure où cette dérogation facilitera la tâche des syndics bénévoles...
- réforme des baux commerciaux : les congressistes de la FNAIM ont surtout eu confirmation qu'elle piétine, et qu'ils n'ont rien de bien spectaculaire à en attendre ("je comprends vos préoccupations, mais mon collègue de la justice a aussi les siennes...")...
- suppression de la loi de 1948 : le ministre est prêt à examiner avec les professionnels et les représentants des propriétaires "comment on peut mettre fin à ce statut (...) devenu obsolète" et "le faire sans pénaliser les ménages modestes ou âgés, par l'intermédiaire de mesures transitoires"... C'est dire que depuis Gilles de Robien les choses n'ont pas beaucoup avancé, mais ce serait quand même pour faire partie de la loi "Habitat pour tous" dont le dépôt, repoussé déjà plusieurs fois, est prévu pour le "printemps 2005"...
(1) projet de loi de programmation pour la cohésion sociale
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