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ACTUS
Immobilier : quand l’échec de la politique du logement aggrave le chômage !
Le
15/7/2011
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C'est ce que fait ressortir une étude du Crédoc, qui ne cesse d'alarmer l'opinion et les pouvoirs publics sur les effets de la hausse des prix de l’immobilier et des loyers, les difficultés de nos concitoyens à trouver un logement adapté à leur situation familiale, les difficultés d’accéder à la propriété pour les classes moyennes, le mal-logement pour les jeunes et les plus précaires, entre autres manifestations de la crise du logement en France, notamment dans les zones "tendues" où l’offre est très inférieure à la demande. Réalisée pour le MEDEF, inquiet devant les difficultés de recrutement croissantes dans ces zones, elle met en évidence un autre aspect de la crise : ses répercussions sur l’emploi, accentuant le déséquilibre du marché entre d'un côté des postes vacants faute de candidats prêts à accepter un taux d'effort excessif pour leur logement, et de l'autre des chômeurs pouvant difficilement trouver un logement adapté dans les zones où les emplois sont proposés...
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Coût du logement, mobilité professionnelle et emploi
L’envolée des prix de l’immobilier n’a pas seulement des répercussions macroéconomiques sur la consommation, l’épargne, l’investissement, l’instabilité conjoncturelle ou le moral des ménages. Elle engendre aussi des entraves à la mobilité résidentielle, élément clé de l’insertion professionnelle et du retour à l’emploi. Or année après année, à mesure que le coût du logement a franchi les étapes successives de son envolée, et notamment depuis 1998, la mobilité résidentielle n'a pas cessé de diminuer : légèrement entre 1998 et 2002 et plus nettement entre 2002 et 2006, plus particulièrement dans le parc locatif : les locataires protégés par un encadrement des hausses de loyer sont piégés dans leur logement et ont de plus en plus de mal à faire le saut vers un nouveau logement où ils subiraient les loyers de marché.
La crainte d’augmenter ses dépenses de logement devient même paralysante : à la question posée par le Crédoc pour son étude à un échantillon de Français : "Si on vous proposait un meilleur emploi que le vôtre, mais que cela vous oblige à déménager en occasionnant un surcoût financier (frais de déménagement, nouveau logement trop cher, risque de moins-value sur la revente de votre ancien logement...), accepteriez-vous cet emploi ?", seuls 28% répondent "oui", 31% répondent "probablement pas" et 39% "certainement pas" ! Manque d'esprit de mobilité des Français ? Ces chiffres sont à relier aux tensions sur le pouvoir d’achat que le Crédoc étudie depuis des années : 46% des personnes interrogées ont le sentiment que, depuis une dizaine d’années, leur niveau de vie s’est dégradé ; seuls 27 % perçoivent une amélioration et 26 % évoquent une stagnation. Parallèlement, près de quatre personnes sur dix ont l’impression que leurs dépenses de logement représentent une lourde charge. Il y a aussi les freins multiples à mobilité que l'on ne retrouve que de manière atténuée dans les pays que l'on cite en exemple pour leur mobilité : frais de mutation en cas d'achat/revente, pénurie locative - voir les temps d'attente pour l'obtention d'un logement social dans certains secteurs comme l'Ile-de-France, pourtant seul moyen d'accéder pour une large part de la population active à un logement abordable -, garanties exigées par les bailleurs, sans oublier la généralisation du travail féminin, plus forte en France qu'ailleurs que dans nombre de pays occidentaux...
Ces facteurs sont illustrés par les différences selon la situation : les réticences au déménagement touche moins les jeunes (54%), les emplois précaires (60%) et les locataires (54%) que les propriétaires de leur logement (80%), les salariés des grandes entreprises (78%), les personnes en poste depuis plus de 20 années (77%) et les couples bi-actifs (76%), pour des raisons aisément compréhensibles.
Les enquêtes contredisent au demeurant le cliché selon lequel les Français seraient viscéralement attachés à leur territoire : 75% des personnes en âge de travailler indiquent que, si elles avaient des difficultés pour trouver un emploi, elles seraient prêtes à déménager dans une autre commune de leur département ; 61% seraient même disposées à changer de région et 38% envisagent la possibilité de partir à l’étranger. Certes, cette perspective rencontre plus d’écho chez les diplômés du supérieur que chez les non-diplômés, et chez les locataires plus que chez les propriétaires de leur logement. Ce résultat vient étayer les analyses de plusieurs économistes ou les travaux plus récents de l’OCDE, lesquels montrent que les pays où le taux de propriétaires est plus important sont également ceux où le taux de chômage est plus élevé ; dans plusieurs nations (dont la France), l’augmentation du taux de chômage serait concomitante avec la progression de l’accession à la propriété !
Le fait est qu’aujourd’hui, le coût lié à un changement de résidence est non négligeable. Il n'est pas seulement lié au seul déménagement et ou aux frais de transaction : l'enquête du Crédoc montre qu'il y a un surcoût financier à long terme impliqué par un déménagement dans une phase de hausse des prix : les personnes qui ont emménagé récemment consacrent une part plus importante de leur budget aux dépenses de logement que celles qui sont en place depuis plus longtemps. Pour se protéger de la hausse du coût du logement, nombreux sont ceux qui préfèrent éviter un changement de résidence. Le logement a pris une telle place dans la vie des Français que leurs arbitrages se font donc souvent au détriment de l’emploi !
Le risque de grippage de la mobilité résidentielle et professionnelle n’est pas virtuel, souligne le Crédoc : "sur les 4,6 millions de chômeurs inscrits à Pôle Emploi, on estime que 500.000 ont renoncé à un poste pour ne pas avoir à supporter un surcoût financier en matière de logement (cela correspond à 11 % des personnes en recherche d’emploi) ; en élargissant la perspective à l’ensemble de la population en âge de travailler, environ 2 millions de personnes auraient récemment refusé un poste pour cette raison (6% de la population en dehors des retraités)".
Où la hausse des prix éloigne les salariés du lieu des emplois
La pression des coûts de l’immobilier a tendance à accroître les distances entre le domicile et le lieu de travail, une part croissante des salariés - notamment au sein des classes moyennes - et des personnes en recherche d’emploi ne peuvent plus résider dans les centres-villes des grands pôles urbains parce que les loyers y sont trop élevés ou parce que les prix d’acquisition des logements dépassent leurs capacités financières. Or, selon les données de l’INSEE citées par le Crédoc, 77% des emplois salariés restent concentrés dans les pôles urbains. Les temps de transports entre le domicile et le travail ont ainsi eu tendance à augmenter, concomitamment à l’étalement urbain.
Aujourd'hui, les arbitrages en matière de logement conduisent à vouloir limiter ces temps de transport, facteur de coût énergétique et de perte de productivité et de qualité de vie croissants. L’enquête du Crédoc montre que la proximité avec le lieu de travail est le deuxième critère de choix d’un logement (41% des suffrages), juste après la qualité de l’habitation (53%) et au même niveau que le cadre de vie dans le quartier (41%). Ce critère est particulièrement important chez les jeunes, les personnes en phase d’insertion professionnelle, les couples ayant des enfants et les cadres.
Ainsi, 51% des actifs occupés déclarent notamment qu’ils refuseraient l’opportunité d’un meilleur emploi que le leur si cela devait se traduire par une augmentation de 30 minutes du temps de transport pour se rendre à leur travail. 7 % des personnes en âge de travailler déclarent avoir récemment renoncé à un poste nécessitant un temps de transport trop important. Cela correspond à un défaut de plus de 2 millions de candidatures pour les recruteurs au cours des cinq dernières années.
Par ailleurs, la crise du logement a aussi tendance à fixer les populations d'actifs dans les régions à faibles opportunités d'emploi, parce que ce sont celles où en général le coût de logement est le plus bas, les chômeurs ou ceux qui ne sont pas satisfaits de leur emploi n'ayant pas les moyens d'accéder à un logement dans des conditions économiquement viables là où les nouveaux emplois sont proposés !
Pas de succès de la politique de l'emploi sans succès de celle du logement
Du coup, conclut le Crédoc, se poser la question de la mobilité professionnelle, de la mobilité résidentielle et du coût du logement, c’est poser indirectement la question de la compétitivité et de l’attractivité des territoires. Si le coût du logement devient prohibitif dans certains bassins d’emploi, il est à craindre que ces régions deviendront de moins en moins attractives pour les populations, et notamment les plus qualifiées. A terme, le dynamisme de certaines régions peut être sérieusement compromis. Les entreprises en sont conscientes et se mobilisent, notamment en Ile-de-France. Le MEDEF est aussi vent debout contre les tentatives de mainmise de l'Etat sur une part croissante des ressources du 1% logement, issues des cotisations des entreprises au titre de la participation à l'effort de construction (la "PEEC") objet d'un "bras de fer" violent en cette fin de printemps entre le gouvernement et Action Logement qui gère les fonds de la vingtaine d'organismes collecteurs.
L’impact positif d’Action Logement se reflète au demeurant dans un autre résultat de l’étude : les personnes ayant bénéficié d’une aide de l’organisme au cours des cinq dernières années ont pu, semble-t-il, plus facilement trouver un logement qui ne soit pas trop éloigné de leur lieu de travail. Le temps de transport entre leur domicile et leur travail est plus faible que celui des autres salariés (18 minutes en moyenne pour les bénéficiaires d’Action Logement, contre 23 minutes pour les autres)...
Il n'est donc pas étonnant de voir des territoires (ils sont environ une vingtaine de villes ou communautés d'agglomération - le dernier en date étant Chambéry métropole, et même maintenant d'entreprises (annonce de L'Oréal cette semaine) proposer aux propriétaires de logements locatifs de prendre en charge les cotisations de GRL (Garantie des risques locatifs), dispositif de garantie des propriétaires contre les impayés créé et mis en oeuvre par Action Logement, pour tout bailleur qui logera un salarié en contrat à durée indéterminée !
Ce ne sera malheureusement pas suffisant, tant le retard pris dans l'équilibrage de l'offre et de la demande de logement a pris du retard : plusieurs décennies perdues, par les gouvernements successifs, à croire qu'il suffisait de quelques incitations fiscales pour remédier aux dysfonctionnements du marché : non seulement elles n'ont pas suffi, mais elles ont aggravé les déséquilibres en encourageant une construction débridée là où il n'y avait pas de demande. Inaction et aveuglement ? Triste constat d'échec d'une pensée unique néo-libérale qui a conduit à casser des instruments de programmation pluriannuelle qui auraient pu s'avérer précieux, comme certains - y compris au plus haut sommet de l'Etat - le reconnaissent aujourd'hui : tels le Plan, et son commissariat général dont le successeur actuel, le Centre d'analyse stratégique, n'est qu'un pâle avatar...
(1) Le rapport présente les résultats des questions insérées à la demande du MEDEF dans l’enquête "Conditions de vie et Aspirations" du Crédoc. L’enquête a été réalisée en face-à-face, entre décembre 2010 et janvier 2011, auprès d’un échantillon représentatif de 2 006 personnes, âgées de 18 ans et plus, sélectionnées selon la méthode des quotas.
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Commentaire posté par
Brennec
, le
18/7/2011 à 17h45 Excellent article, bonne analyse des symptomes. Dommage que l'auteur tombe dans la pensée unique qu'il dénonce en accusant les 'dysfonctionnement du marché' et la pensée 'néo-libérale' (?). Je pense que pour sa culture et pour aprendre ce qu'est le libéralisme (neo, ultra ou non) il ferait bien d'aller consulter les articles de Vincent Benard sur le blog objectif liberté. Il pourrait alors constater que les dysfonctionnements du marché sont essentiellement dus a des politiques étatiques et qu'en matière de logement il n'y a rien de moins libéral que la france. Peut être aussi, s'il n'a pas le courage de le faire, pourrait-il aussi s'intéresser a ce qui se passe dans d'autres pays où le marché n'a pas de dysfonctionnement et faire des comparaisons qui ne pourraient qu'être fructueuses.
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