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ACTUS

Libéralisation des tarifs du gaz et de l'électricité : les risques pour les locataires, les propriétaires et les bailleurs...


Le 25/6/2007
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UI - Actus - 25/6/2007 - Libéralisation des tarifs du gaz et de l'électricité : les risques pour les locataires, les propriétaires et les bailleurs...
Drôle de libéralisation : censée profiter au consommateur, l'ouverture à la concurrence du marché du gaz et de l'électricité pour les particuliers risque contrairement à son objectif de se traduire à terme par un renchérissement du coût de ces énergies pour les ménages ! Aussi les conseils de prudence se multiplient, incitant à ne pas se laisser séduire par les premières offres alléchantes qui arrivent sur le marché, et à rester au contraire sous la protection des tarifs réglementés des fournisseurs historiques, GDF pour le gaz et EDF pour l'électricité, puisque - autre paradoxe de la situation - les consommateurs en ont encore la possibilité, et que ces tarifs augmenteront probablement moins que ceux du marché libre... D'autant qu'une option inconsidérée pour la concurrence est irréversible pour le point de livraison, et que la perte du bénéfice du tarif réglementé peut se traduire du coup par une baisse de valeur vénale ou locative du logement !
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C'est du jamais vu : à compter du 1er juillet prochain, les particuliers auront la possibilité de s'adresser à d'autres fournisseurs d'énergie que ceux détenant un monopole aujourd'hui (EDF, GDF), et pour des prix différents (tarif libre au lieu du tarif règlementé fixé par l'Etat), et alors même qu'elles devraient se réjouir de l'arrivée pour la première fois de la concurrence dans un secteur monopolistique, des organisations de consommateurs font campagne pour dissuader les clients d'en profiter !

Car, à y regarder de plus près, les espoirs que la fin du monopole de GDF pour le gaz et d'EDF pour l'électricité entraînent une baisse des prix de ces deux énergies pour les consommateurs sont quasi-nuls ! D'une part les tarifs actuels sont réglementés, et très probablement déjà en dessous de ceux auxquels pourraient prétendre leurs titulaires dans un contexte de liberté, les gouvernements quels qu'ils soient, conscients du poids politique du dossier, tâchant de limiter au maximum les hausses. D'autre part, en ce qui concerne plus particulièrement l'électricité, EDF a du fait de son parc nucléaire les coûts de production les plus favorables, lui permettant de maintenir à moyen terme les offres les plus avantageuses !

De surcroît, la spécificité de cette ouverture à la concurrence tient aussi au fait qu'elle s'effectue avec maintien des prix réglementés :

- pour les logements existants : sans limite dans le temps pour le moment,

- pour les logements neufs livrés à compter du 1er juillet : pour l'électricité seulement, et jusqu'au 1er juillet 2010 (grâce à un amendement inséré dans la loi "DALO" du 5 mars 2007) ; pour le gaz, dès le 1er juillet 2007, le consommateur n'aura accès qu'aux offres au tarif libre, même s'il s'adresse à GDF.


Par contre, lorsque l'occupant d'un local, propriétaire ou locataire, aura opté pour l'offre d'un concurrent d'EDF pour l'électricité (même s'il s'agit de GDF qui propose aussi de l'électricité), ou celle d'un concurrent de GDF pour le gaz (même s'il s'agit d'EDF si l'électricien se lance aussi dans le gaz...), un éventuel retour au fournisseur initial ne permettra pas de revenir au tarif réglementé : il faudra souscrire une offre au tarif libre ! En effet, l'abonnement en énergie est rattaché au logement lui-même et non à la personne qui l'occupe.

Cette irréversibilité du passage aux tarifs du marché libre était une condition sine qua non de la possibilité de maintenir des tarifs réglementés en compatibilité, avec les directives européennes relatives à l'ouverture à la concurrence du marché de l'énergie, telles que transposées en droit interne par les lois du 10 février 2000 et du 3 janvier 2003, modifiées par les lois du 9 août 2004, du 13 juillet 2005 et du 7 décembre 2006 : directive de 1996 concernant l'électricité, suivie en 1998 d'une directive sur le gaz, et deux directives du 26 juin 2003 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et du gaz naturel, ayant vocation à organiser le marché de l'énergie sur l'ensemble du territoire de l'Union européenne.

Reste au demeurant à savoir si cette compatibilité est réelle ou théorique : on apprenait au début du mois que les services de concurrence de la Commission européenne ouvraient une enquête formelle sur les tarifs réglementés de l'électricité en France, afin de déterminer si ce dispositif favorable aux grandes et moyennes entreprises est compatible ou non avec le droit européen de la concurrence ; il n'en aura pas fallu plus aux milieux boursiers pour faire grimper le cours du titre EDF et faire de l'électricien français la plus grosse capitalisation du CAC 40, à 140,7 milliards d'euros. Selon les spécialiste des questions énergétiques, les investisseurs plébiscitent le titre EDF pour deux raisons : le bon état du parc nucléaire, qui produit une énergie à bas coût, mais aussi la fin programmée des tarifs réglementés, qui devraient permettre à EDF d’augmenter fortement ses tarifs...


Le dilemme du consommateur

En attendant, et dans l'incertitude de ce que réserve l'avenir, les particuliers qui auront encore la possibilité de bénéficier des tarifs réglementés ont intérêt, lorsqu'ils seront soumis, comme il faut s'y attendre à des offres alléchantes à court terme, à réfléchir à deux fois avant de quitter leur fournisseur historique !

Et ils le seront certainement : pour séduire les clients, les différents fournisseurs d'énergie, parmi lesquels les deux prestataires historiques (EDF et GDF), n'hésiteront pas à attaquer le marché avec des prix attractifs, même par rapport aux tarifs actuels réglementés. Du moins au début... Des offres relayées par des campagnes de communication suffisamment persuasives comme celles entamées par GDF, visant à regrouper la fourniture d'électricité et de gaz chez le même fournisseur, avec pour slogan "simplifiez-vous vos factures"...

Rien n'empêchera ces fournisseurs de leur répercuter par la suite le véritable coût de l'énergie sur le marché libre, alors qu'ils ne seront plus en mesure de revenir en arrière aux tarifs du marché réglementé ! L'expérience des consommateurs professionnels est à cet égard édifiante : selon des informations publiées par Le Monde, les 20% des sites industriels gros consommateurs, qui pouvaient quant à eux s’adresser au marché libre depuis 2000 et 2003 et ont choisi ce dernier, ont vu leur facture bondir d'avril 2001 à avril 2006 de 75%. A tel point que le législateur a adopté, en catastrophe et sans grande logique, dans la loi du 7 décembre 2006, une disposition leur permettant de demander à leur fournisseur de bénéficier pendant deux ans d'un tarif transitoire qui ne peut pas être supérieur de plus de 23% au tarif réglementé ! Même chose pour les autres consommateurs professionnels, qui ont quant à eux accès au marché libre depuis le 1er juillet 2004, et dont les 20% qui ont opté pour le marché libre ont vu leurs tarifs grimper jusqu'à 60% au dessus du prix de souscription !

Et ce n'est pas fini, vu l'état du marché mondial de l'énergie, les risques sur l'approvisionnement en gaz en provenance de Russie, et le retard pris dans la création de capacités de production électrique en France et en Europe par rapport aux besoins à court et moyen terme !

En tous cas, dans la perspective d'un creusement important de l'écart entre les tarifs du marché libre et les tarifs réglementés, l'option pour les tarifs du marché libre ne sera pas sans conséquence pour la valeur des biens concernés, même si à court terme les tarifs appliqués n'entraînent pas un surcoût sensible : les appartement et maisons où le gaz et l'électricité devront être payés au prix fort se vendront ou se loueront forcément moins bien que les mêmes où l'on peut encore profiter de tarifs réglementés restés modérés !

Sont particulièrement concernés, notamment pour les contrats de gaz ou électricité pour le chauffage :

- les propriétaires occupants susceptibles de vendre leur logement dans les deux ou trois années à venir, et qui risquent de subir une moins-value imprévue, l'acquéreur éventuel étant obligé dès lors que le contrat à tarif réglementé a été résilié une fois, de souscrire un contrat au tarif "libre", ou s'il s'agit d'un investisseur de consentir un rabais sur la location, le futur locataire ne pouvant lui aussi bénéficier du tarifs réglementé ;

- les locataires susceptibles de quitter leur location dans le même délai et qui peuvent se voir reprocher par leur propriétaire de lui avoir créé un préjudice en rendant la relocation (ou la revente le cas échéant) plus difficile pour la même raison !


Les bailleurs désarmés...

Cette éventualité ne manque pas d'inquiéter les propriétaires bailleurs, à la recherche de moyens juridiques de se protéger de la part de leurs locataires d'une mise devant le fait accompli que constituerait une résiliation du contrat à tarif réglementé sans leur autorisation : sont notamment envisagés un avertissement aux locataires en place, leur enjoignant de conserver leur fournisseur actuel, et une clause insérée dans le bail des nouveaux locataires, leur interdisant tout changement sans autorisation préalable !

On peut cependant s'interroger sur la légalité de ce type de protections, l'accès à la concurrence pour une prestation à caractère locatif étant un droit absolu du locataire ! Par ailleurs, quand bien même une clause du bail interdisant un changement sans autorisation serait reconnue licite, un propriétaire ne pourrait, sans risquer de se voir reprocher un abus de droit, refuser l'autorisation de souscrire à une offre manifestement avantageuse, au seul motif que l'avantage puisse disparaître et se changer en désavantage à moyen terme !

Reste la possibilité pour un bailleur de demander réparation pour un préjudice avéré : là encore, rien n'est moins sûr ! Pour que la responsabilité du locataire puisse être mise en cause, encore faut-il faire état d'une faute du locataire : or il est douteux que le fait de souscrire à une offre concurrentielle avantageuse à un moment donné puisse être considérée comme fautive, même par imprudence ! Peut-on reprocher en effet à un locataire de n'avoir pas correctement prévu l'avenir ?



Plus d'informations sur le site de la Commission de régulation de l’énergie (CRE) www.energie-info.fr


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