Les chiffres de CLAMEURL'observatoire CLAMEUR (acronyme de Connaître les loyers et analyser les marchés sur les espaces urbains et ruraux), a présenté le 10 mars ses chiffres arrêtés à fin février 2015. Ils sont d'autant plus intéressants que CLAMEUR est aujourd'hui, en attendant les observatoires locaux des loyers et l'utilisation qui en sera faite, l'outil le plus élaboré et le plus fin de connaissance du marché locatif privé, avec une couverture de plus en plus large (villes et territoires regroupant 95,9% du parc privé et 91,5% de la population résidente en métropole), et des références à hauteur de près d'1 bail sur 5 signé en France, et jusqu'à 1 sur 3 dans certains secteurs. Opéré par le professeur Michel Mouillart, de l'Université Paris-Ouest, il est alimenté par tous les grand groupes d'administration de biens, plusieurs réseaux d'agences immobilières, le Crédit Foncier Immobilier, de grandes foncières, la SNI (groupe Caisse des Dépôts), des bailleurs privés de l'UNPI, des professionnels adhérents de l'UNIS et du SNPI, etc. Il doit normalement servir pour les professionnels assujettis de canal d'alimentation des observatoires locaux en cours de mise en place par l'Etat. Premier enseignement : le marché locatif qui était à un niveau très bas d'activité au 1er semestre 2014, est reparti pendant l'été et n'a plus fléchi jusqu'en début 2015 alors que les mois d'hiver sont en général une période de repli ! La mobilité résidentielle (part des locataires qui changent de logement) est remontée à 28,9%, au dessus de la moyenne depuis 1998, alors qu'elle était inférieure depuis 2008 ! Mais ce redémarrage est inégal : la mobilité reste faible et même en repli en Ile-de-France (21,5%), de même qu'en Rhône-Alpes et en PACA (26,2% dans les deux cas), elle est forte dans le Nord (32,4%), en Alsace (36,1%), en Aquitaine (35,4%), en Midi-Pyrénées (37,9%) en Languedoc-Roussillon (37,7%) ou en Poitou-Charentes (39,2%), et elle explose dans l'Ouest (43,8% en Bretagne et 49,7% en Pays de Loire) et en Franche-Comté (45,8%) ! Ces évolutions sont sans lien apparent avec le niveau des loyers : la mobilité baisse en Lorraine et dans le Limousin où les loyers sont parmi les plus faibles, alors qu'elle se redresse en Languedoc-Roussillon et en PACA où les loyers sont parmi les plus élevés... Dans deux cas particuliers de marchés à faible mobilité, presque bloqués, la mobilité se redresse à Marseille, même si elle reste à un niveau très bas (18,1%), et continue à s'enfoncer à Paris intra muros (16,7%)... Le niveau des loyers a augmenté légèrement au cours de l'ensemble de l'année 2014 : +1% contre une inflation de 0,5%. Mais il a régressé rapidement en fin d'année, plus fortement qu'à pareille époque habituellement. Du coup, à fin février 2015, les loyers sont globalement en baisse de 0,9% en glissement annuel. Les petits logements voient leur loyer continuer à baisser, plus fortement que l’année précédente : -2% en moyenne pour les studios (22,6% du marché), -1,8% pour les 2 pièces (32,6% du marché), et pour la 1ère fois -0,2% pour les 3 pièces (26,2% du marché). En revanche, les plus grandes surfaces voient leur loyer augmenter, un peu moins fortement néanmoins : +1,8% pour les 4 pièces (12,3% du marché) et même +3,5% pour les 5 pièces et plus (6,3% du marché) ! Au niveau des villes, les évolutions sont contrastées : les loyers baissent à présent dans 53,6% des villes de plus de 10.000 habitants (contre 40% l’année précédente). Le phénomène est accentué dans les villes plus importantes : depuis le début de l'année 2014, les loyers baissent dans 80% des villes de plus de 148.000 habitants, ils progressent moins que l'inflation dans 10% d'entre elles, ils augmentent au-delà de l'inflation dans 10% des villes et n'augmentent de plus de l'inflation que dans 2 villes. Dans la 1ère catégorie, parmi les plus fortes baisses, citons Lille (-1,1%, à 13,6 euros/m2), Bordeaux (-1,3%, à 12,7 euros), Nice (-3,4%, à 14,6 euros) et Paris (-3,5%, à 24,4 euros). Dans la deuxième Saint Etienne (+0,2%, à 7,6 euros) et Marseille (+0%, à 12,5 euros). Les deux villes qui augmentent le plus sont Reims (+0,6%, à 12,6 euros) et Le Mans (+1,7%, à 9,1 euros). L'effort d'amélioration et d'entretien des logements continue sa descente aux enfers : plus que 16,5% des logements reloués en 2014 ont bénéficié de travaux avant leur remise en location contre plus de 25,7% en 2013 et 23,2% en moyenne de 1998 à 2014). Cette chute – un record depuis 1998 – explique au moins autant que le contraire la sagesse des loyers, car il se constate que les gros travaux permettent un meilleur "saut" du loyer à la relocation. Conséquence probable de la baisse de qualité des logements la poursuite de la hausse de la vacance entre deux locataires qui atteint 8 semaines en moyenne, ce qui équivaut chaque année à une perte de 4,3% des loyers perçus. Haro sur l'encadrement des loyersLes chiffres parlent d'eux-mêmes. Plus problématique est l'interprétation à leur donner. Même si on ne parle plus d'encadrement des loyers que pour Paris, les opérateurs de CLAMEUR en font un outil de preuve de l'inutilité, voire de la nocivité du principe même d'encadrement. L'encadrement des loyers serait inutile puisque le marché semble se réguler de lui-même. Tout au plus l'encadrement à la Duflot risque de le déstabiliser ! A l'appui de cette démonstration, CLAMEUR s’est livré comme l’an dernier mais avec des données plus précises, à une estimation de l’effet que pourrait avoir l'encadrement des loyers à Paris : si les "loyers médians de référence majorés" sont systématiquement fixés par les préfets à 20% au-dessus des loyers médians calculés par l’OLAP, le mécanisme d'écrêtage des loyers de marché concernera (en moyenne et aux conditions de marché de l'année 2013) de l'ordre de 20,4% des relocations. La baisse de ces loyers écrêtés pourrait être aussi en moyenne de 22,5% par rapport aux niveaux actuels, entraînant une baisse moyenne de l'ensemble des loyers de 4,6%. A noter que l'écrêtage fait bouger la moyenne des loyers mais pas le loyer médian, les loyers écrêtés restant dans la moitié des loyers les plus élevés. Il est probable que des bailleurs, confrontés à une baisse de leur revenu, seront incités à saisir la première occasion de vendre leur bien, au risque de restreindre encore un peu le parc de logements disponibles à la location. Combien seront-ils ? Nul ne sait : l'expérience passée a montré que les propriétaires privés sont moins sensibles au rendement de leur patrimoine qu'à la conservation de sa valeur. Si ce n'était le cas, seraient-ils encore là avec des rendements faciaux déjà aussi faibles ? Il est certain qu'un désengagement des bailleurs des biens à loyers les plus élevés conduirait les locataires à se reporter sur ceux de moindre qualité, à loyer plus intermédiaire, repoussant à leur tour leurs occupants vers les logements les moins chers, et donc les plus médiocres. Or, l'Observatoire CLAMEUR montre aussi que 11,8% des logements aux loyers les plus bas, situés 30% en dessous du loyer de référence minoré pourront, en application de la loi "ALUR", donner lieu à réévaluation lors de leur renouvellement ou de leur relocation. La hausse pourrait être de 15 à 20% suivant les arrondissements et les types. La procédure existait déjà depuis 1986 puis 1989 (article 17c de la loi de 1989 avant ALUR), et il est probable que les logements qui restent aujourd'hui à ce niveau de loyer n'ont pu, en raison de leur médiocrité donner lieu à réévaluation. Mais pour le professeur Mouillart, l'effet de déplacement de populations de locataires pourrait redonner de l'attractivité à ces logements et encourager à nouveau les propriétaires à tenter la réévaluation... Des tendances plus profondes ?Ces scénarios noirs reposent en tous cas sur l'hypothèse d'un désengagement des bailleurs de la location que rien ne prouve pour le moment. C'est même tout le contraire : augmentation des durées de vacance et baisse des loyers sont plutôt les caractéristiques d'un marché qui se détend, alors même qu'il reprend de l'activité. Certes moins à Paris, menacé d'encadrement. Mais le niveau des loyers n'est-il pas une cause du blocage de la mobilité : lorsqu'on a un logement dans la capitale, a-t-on les moyens d'en chercher un plus grand, ou de meilleure qualité ? L'analyse des chiffres de CLAMEUR pose d'autres questions : la baisse de l'effort d'amélioration entretien est-elle une conséquence ou une cause de la baisse des loyers. Pour les opérateurs de l'observatoire, le niveau des loyers ne permet plus aux propriétaires d'entretenir les logements. En cas de changement de locataire, ils les laissent donc en l'état ou avec une réfection légère, et augmentent moins le loyer en conséquence lors d'un changement de locataire. Ce qui leur retire des moyens pour des travaux d'amélioration futurs. Un cercle vicieux aggravé par le climat psychologique occasionné par l'alourdissement de la fiscalité des revenus locatifs et des plus-values à la revente sous l'ancienne majorité, et par les mauvais signaux donnés aux bailleurs par la nouvelle. Ce n'est probablement pas faux : la psychologie jour un rôle important sur les marchés et celui de l"immobilier ne fait pas exception. Observons que les professionnels partagent la responsabilité de ce mauvais climat, en criant au loup et en sur-dramatisant les effets de la loi "ALUR". Mais d'autres raisons peuvent expliquer la baisse des travaux de rénovation, et d'abord une raison économique : le fait que les bailleurs ne sont pas tous aisés et que beaucoup sont touchés par la crise, voire même sont au chômage ! Une autre explication peut être que le parc des logements locatifs a déjà fait le plein des rénovations lourdes (CLAMEUR ne retient que ce type de travaux) ! Dans le contexte général actuel, les chiffres de CLAMEUR ne sont peut-être pas porteurs que de mauvaises nouvelles. Le parc locatif privé compte près de 6 millions de logements. Bien que l'INSEE et le ministère du logement ne publient les statistiques qu'avec un grand retard, rien ne montre qu'il diminue. Des bailleurs profitent du départ de locataires pour vendre, en général à de futurs propriétaires occupants, mais un flux de logements (30-40.000 par an), en majorité neufs, continue à être acheté par des investisseurs. Il y aurait même selon les promoteurs une embellie ces derniers mois. Mais ce parc immobilier n'a pas vocation à répondre à tous les besoins de logements, et en particulier des jeunes et des catégories modestes dans les zones tendues. Les expériences de location à caractère social contre avantage fiscal n'ont jamais donné de résultats tangibles (voir notamment l'échec du régime "Borloo ancien"...). Les propositions de "bail solidaire" ou "bail social" n'ont pas plus de chances de réussite ! C'est le rôle du parc social de mettre à disposition de ceux qui ne peuvent se loger dans le privé des logements à loyers accessibles, et c'est là que les financements publics sont les mieux utilisés. Accessoirement, un parc intermédiaire institutionnel, lui aussi financé de manière préférentielle peut permettre une sortie plus progressive des locataires du parc social, faisant de la place pour les nouveaux entrants. Dans de nombreuses villes de province, la construction de logements sociaux a largement contribué, autant que les régimes de défiscalisation, et pour un coût moindre pour la collectivité, à décongestionner le marché locatif local. C'est probablement la meilleure recette à appliquer aux zones les plus tendues... (1) Dossiers CLAMEUR - 10 mars 2015 – La conjoncture du marché locatif privé - Les loyers de marché à fin février 2015 Voir aussi : Universimmo.com Peut-on et doit-on faire baisser les prix de l'immobilier ? 3ème partie : peser sur les loyers -*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-* Inscrivez-vous pour revevoir gratuitement notre lettre d’information Des réponses à vos questions !!! Actualité : Voir tous nos articles Voir toutes nos fiches pratiques Voir tous nos dossiers Recevez gratuitement le sommaire de la LA LETTRE D'INFORMATION DU PROFESSIONNEL IMMOBILIER spécialement destinée aux professionnels de l'immobilier résidentiel. -*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*-*- UniversImmo.com |
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