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La loi " SRU " et la copropriété : le catalogue complet des changements Le 24/11/2000
UI - Actus - 24/11/2000 - La loi " SRU " et la copropriété : le catalogue complet des changements
Dans la plus grande discrétion - la grande presse n'a retenu que l'obligation faite aux communes sous peine de redevance de compter au moins 20% de logements sociaux sur leur territoire - la loi " SRU " (Solidarité et Renouvellement Urbains) qui vient d'être adoptée en dernière lecture à l'Assemblée comporte entre autres réformes importantes la plus grande réforme de la loi sur la copropriété depuis 1985 !

Et ce dans la droite ligne de la voie ouverte par la précédente réforme de 1994, à savoir la prise en compte de tous les facteurs pouvant conduire une copropriété sur la pente des difficultés financières et relationnelles ainsi que de la dégradation du patrimoine.

Les modifications introduites dans le droit de la copropriété ne sont pas anodines, et vont changer en profondeur de nombreux aspects du fonctionnement des copropriétés, à condition bien entendu que les syndics jouent le jeu…

1) Gestion des copropriétés

- Tenue de l'assemblée dans les six mois du début de l'exercice pour voter le budget prévisionnel ;

- Généralisation de la gestion par provisions sur budget ; les provisions sont trimestrielles et du quart du budget, sauf à ce que l'assemblée décide une autre périodicité ; elles sont exigibles le premier jour de chaque trimestre ou période fixée par l'assemblée ; par ailleurs, un décret déterminera la liste des dépenses de travaux d'entretien qui ne devront pas être comprises dans le budget prévisionnel et donc être appelées suivant modalités spécifiques votées par l'assemblée ;

- Harmonisation des comptabilités d'un syndic à l'autre, qui devront se conformer à " des règles comptables spécifiques fixées par décret " ; au passage, il est confirmé que les syndicats de copropriétaires échappent bien à la loi du 6 avril 1998 portant réforme de la réglementation comptable (ouf ! il était temps…) mais pour la première fois une règle de base de la comptabilité générale est rendue obligatoire dans la comptabilité des copropriétés : l'enregistrement des charges " dès leur engagement juridique " ;

- Obligation pour le syndic de soumettre au vote de l'assemblée les comptes du syndicat et leurs annexes ; aussi étrange que cela paraisse, cette obligation ne figurait pas en toutes lettres mais sa formulation - les " annexes " - pourrait laisser présager une présentation plus élaborée que ce qui se pratique à l'heure actuelle…

- L'assemblée des copropriétaires, qui pouvait arrêter " un montant des marchés et des contrats à partir duquel la consultation du conseil syndical est rendue obligatoire ", peut dorénavant arrêter à la même majorité - celle de l'article 25 (majorité des voix de tous les copropriétaires) - un montant des marchés et contrats à partir duquel une mise en concurrence est rendue obligatoire ;

2) Modification des prises de décisions

- Modification importante de l'article 24 de la loi du 10 juillet 1965 : les décisions relevant de cet article (c'est à dire celles qui ne relèvent pas d'autres articles et notamment des article 25 et 26) sont désormais prises à la majorité des voix " exprimées " des copropriétaires présents et représentés ; autrement dit, les abstentions ne jouent plus comme des votes contre la résolution proposée !

- Possibilité pour les assemblées de copropriétaires d'adopter des décisions relevant de l'article 25 (majorité des voix de tous les copropriétaires) à la majorité de l'article 24 modifié (majorité des voix exprimées des copropriétaires présents et représentés) en revotant au cours de la même assemblée si au premier vote la résolution proposée a obtenu au moins un tiers des voix de tous les copropriétaires ! C'est donc la fin des reconvocations d'assemblées de deuxième lecture, qui ne se justifient plus que si les présents et représentés totalisent moins d'un tiers des voix de tous les copropriétaires ou si moins d'un tiers des voix de tous les copropriétaires sont réunies pour ou contre la résolution…
Par contre, si une assemblée de deuxième lecture est nécessaire, elle doit être convoquée dans les trois mois (avant, il n'y avait pas de délai fixé pour cette convocation !).

Ce n'est pas négatif, mais cela donne de belles pagailles en perspective dans les assemblées en attendant que syndics et copropriétaires comprennent comment ça marche !

- Les décisions pour la pose de compteurs d'eau froide divisionnaires pourront être prises à la majorité de l'article 25 (majorité des voix de tous les copropriétaires avec la possibilité d'un second vote comme indiqué ci-dessus) et non plus de la double majorité de l'article 26 (la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix de tous les copropriétaires) ; cette pose n'est donc plus considérée comme une amélioration de l'immeuble mais une mesure d'administration ;

- Une nouvelle dérogation est créée à la règle de l'unanimité de l'article 26 pour l'aliénation de parties communes dont la conservation est nécessaire au respect de la destination de l'immeuble, mais qui est nécessitée dans le cadre d'une restructuration entrant dans le champ d'application de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en œuvre du pacte de relance pour la ville ;

- Le statut des unions de syndicats, leurs règles de fonctionnement et les modalités d'adhésion ou de retrait sont remontées dans la loi alors qu'elles n'étaient définies que dans le décret d'application.
Curieusement, la possibilité pour les " syndicats coopératifs de copropriété et les syndicats dont le syndic est un copropriétaire, même s'ils n'appartiennent pas au même ensemble, de constituer entre eux des unions ayant pour objet de créer et gérer des services destinés à faciliter leur gestion, ainsi que la vie sociale des copropriétés ", disparaît de la loi sous sa formulation explicite ; il reste une formulation ambiguë qui méritera d'être explicitée…

L'adhésion à une union de syndicats peut désormais être décidée à la majorité de l'article 25 (majorité des voix de tous les copropriétaires avec la possibilité d'un second vote comme indiqué ci-dessus), mais le retrait reste soumis à la double majorité de l'article 26 (la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix de tous les copropriétaires) ;

3) Dispositions favorisant l'adoption du mode de gestion coopératif

- En cas d'adoption du mode de gestion coopératif, dans lequel le syndic est élu par les membres du conseil syndical, est choisi parmi ceux-ci et exerce de droit les fonctions de président de ce conseil, deux innovations d'importance : création d'un poste de vice président qui supplée le syndic en cas d'empêchement de celui-ci (le système politique américain serait-il à la mode ?…) et désignation (obligatoire ?) par l'assemblée d'une ou plusieurs personnes physiques ou morales, copropriétaires ou extérieures qualifiées pour assurer le contrôle des comptes du syndicat : cela ressemble beaucoup à des commissaires au comptes et c'est à notre avis très salutaire !

- Les décisions d'adoption ou d'abandon du mode de gestion coopératif relèvent désormais de la majorité de l'article 25 (majorité des voix de tous les copropriétaires avec la possibilité d'un second vote comme indiqué ci-dessus) et non plus de la double majorité de l'article 26 (la majorité des membres du syndicat représentant au moins les deux tiers des voix de tous les copropriétaires) ;

4) Le compte bancaire (3è épisode)

L'ouverture d'un compte bancaire au nom du syndicat sera de droit, sauf vote explicitement contraire de l'assemblée, cette possibilité n'étant ouverte bien entendu qu'aux syndics professionnels ; s'il ne fait pas procéder à un tel vote lors de l'assemblée qui le nomme, ou pour les syndics en place avant le 31 décembre 2002, le syndic qui n'ouvre pas de compte bancaire au nom du syndicat (les comptes au nom du syndic à l'usage exclusif d'une copropriété ne sont pas admis !) dans les trois mois de sa désignation ou au plus tard le 31 décembre 2002 voit son mandat frappé de nullité de plein droit !

Par contre, la nullité du mandat qui menaçait chaque fois qu'un délai de trois ans jour pour jour s'écoulait entre deux votes sur la décision ou non d'ouvrir un compte bancaire au nom du syndicat, même si le syndicat avait déjà adopté un tel compte, disparaît et c'est un bien car il s'agissait vraiment d'une disposition stupide !

Reste tout de même à savoir si le vote de renonciation au compte au nom du syndicat vaut au delà du renouvellement du mandat du syndic, ou s'il faut y procéder à chaque renouvellement !

5) Le carnet d'entretien d'immeuble (enfin…)

Mise en place obligatoire au plus tard au 1er juin 2001 d'un carnet d'entretien de l'immeuble ou ensemble immobilier " conformément à un contenu défini par décret " et communication obligatoire aux candidats acquéreurs d'un lot ;

6) Le recouvrement des charges impayées facilité (enfin aussi…)

" Les frais nécessaires exposés par le syndicat, à compter de la mise en demeure, pour le recouvrement d'une créance justifiée à l'encontre d'un copropriétaire, sont imputables à ce seul copropriétaire " ! On a tendance à dire enfin ! A contrario, si la procédure s'avère non justifiée, le copropriétaire attaqué ne participe même pas en quote-part aux dépenses engagées ! Mais attention : " le juge peut toutefois en décider autrement en considération de l'équité ou de la situation économique des parties a litige " … Vaste programme ! des précisions seront les bienvenues… Par ailleurs, les procédures en recouvrement pourront devenir plus expéditives et donc moins coûteuses : le copropriétaire n'ayant pas obtempéré au bout de trente jours à une mise en demeure de régler une provision pourra être condamné en référé et avec exécution provisoire de plein droit au paiement de la provision impayée et l'ensemble des provisions restant à appeler pour l'exercice !

7) Scissions de copropriétés et copropriétés en difficulté

- Les scissions de copropriétés sont facilitées : sous réserve toujours que la division de la propriété du sol soit possible, la décision pour les copropriétaires des lots constituant un ou plusieurs bâtiments de se séparer du reste de la copropriété pourra être prise à la majorité des voix de tous les copropriétaires de ces bâtiments et avalisée par la majorité des voix de tous les copropriétaires du syndicat global (toutefois sans possibilité de deuxième vote ou de deuxième lecture à la majorité de l'article 24…) ;
Les modifications rendues nécessaires en matière de règlement de copropriété sont prises à la majorité de l'article 24 modifié (majorité des voix exprimées des copropriétaires présents et représentés) " sauf en ce qui concerne la destination de l'immeuble " (cas où l'unanimité reste obligatoire), de même que la décision de création d'une union de syndicats pour " la création, la gestion et l'entretien des éléments d'équipement communs qui ne peuvent être divisés " ;

Enfin, les partages et redistributions de parties communes sont exonérés de droit d'enregistrement et de taxe de publicité foncière.

- Dans les copropriétés en difficulté, l'administrateur provisoire se voit attribuer tous les pouvoirs du syndic dont le mandat cesse de plein droit sans indemnité… Cette mesure provoque les protestations des professionnels qui y voient ce qu'elle est en réalité, à savoir une sanction du syndic sous la gestion duquel l'immeuble a vu ses difficultés s'aggraver au point de nécessiter une intervention extérieure ! les syndics qui ne s'estiment pas responsables de la situation n'auront qu'à démissionner avant…
Une disposition permet également permet à l'administrateur provisoire, au Procureur de la République ou aux copropriétaires de solliciter du président du tribunal de grande instance la modification, le prolongement de sa mission ou la décision d'y mettre fin. Le magistrat peut aussi se saisir d'office sur ce point.

Enfin, sur rapport de l'administrateur provisoire et avec l'avis favorable des copropriétaires, le président du tribunal de grande instance peut prononcer la scission de la copropriété " si d'autres mesures ne permettent pas le rétablissement de [son] fonctionnement normal " !

Dans tous les cas, l'ordonnance de nomination et le rapport de l'administrateur provisoire sont communiqués aux copropriétaires, au procureur de la République, au préfet du département et au maire de la commune de l'immeuble ;

8) Autres dispositions importantes

- Obligation est faite désormais aux notaires d'adresser la notification de vente d'un lot, ouvrant le droit d'opposition du syndic, dans un délai de 15 jours de la " date du transfert de propriété " ; jusque là il n'y avait pas de délai maximal de fixé ce qui conduisait à de nombreuses anomalies…

- Les services de distribution d'eau ne pourront plus s'opposer à l'individualisation des contrats de fourniture d'eau dès lors qu'elle est demandée par " le propriétaire ", qui doit prendre en charge le coût des transformations nécessaires ; en fait, la rédaction définitive de cet article n'est plus aussi claire que les rédactions intermédiaires, et il faudra attendre le décret d'application pour savoir s'il est ou non restreint aux ensembles immobiliers locatifs… De toutes façons, cette possibilité si elle devait être mise en œuvre en copropriété se heurtera au coût de la mise en place et de celui de l'abonnement fixe individuel ; cette disposition sera par contre utile dans les copropriétés en difficulté où le problème des consommations d'eau et le règlement des factures est crucial !

- Tous les nouveaux règlements de copropriété publiés à compter du 31 décembre 2002 devront indiquer " les éléments pris en considération et la méthode de calcul permettant de fixer les quotes-parts de parties communes et la répartition des charges ".

- Les anciens règlements devront dans les 5 ans de la publication de la loi être mis à jour des adaptations rendues nécessaires par les modifications législatives intervenues depuis leur établissement, par décision de l'assemblée à l'article 24 modifié (majorité des voix exprimées des copropriétaires présents et représentés), la publication pouvant s'effectuer au droit fixe.

- La mise en copropriété d'un immeuble de plus de 15 ans doit être précédée d'un diagnostic technique " portant constat de l'état apparent de la solidité du clos et du couvert et de celui de l'état des conduites et canalisations collectives ainsi que des équipements communs et de sécurité ". Gageons que le décret d'application apportera d'utiles précisions à ce sujet ! en tous cas, sa communication aux candidats acquéreurs d'un lot sera obligatoire.
Par ailleurs, est dorénavant interdite sous peine de lourdes sanctions pénales la mise en copropriété d'immeubles insalubres ou en péril, ou comportant des logements ne réunissant pas des critères minimaux d'habitabilité et de confort (14 m3 et 33 m3 respectivement de surface et de volume habitables, alimentation en eau potable, évacuation des eaux usées, diagnostics amiante et saturnisme notamment), ou enfin s'ils sont de grande hauteur s'ils ne répondent pas aux prescriptions de sécurité.

Enfin, plusieurs dispositions concernent les modalités de mise en œuvre des plans de sauvegarde et les moyens d'intervention pour assurer la restructuration d'ensembles dégradés, revitaliser des quartiers et aider les copropriétaires en difficulté. Nous reviendrons sur ces aspects, mais comme nous l'indiquions dans notre précédent article, il ne faut pas se faire d'illusions : la mise en œuvre de plans de sauvegarde est appelée à se multiplier ; mais intervenant en général dans des contextes de forte dévalorisation du patrimoine, ils conduiront tôt ou tard à l'acquisition par les organisme HLM d'une part importante des logements, et par conséquent à la transformation de ces copropriétés en ensembles de logement social ; ce n'est pas forcément un mal mais cela ne fait en général pas l'affaire des copropriétaires solvables qui risquent de voir leur capital définitivement dévalorisé…

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