ACTUS
Le marché du viager va-t-il être absorbé par les banques ?
Le
17/5/2006
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Difficile de connaître le nombre de ventes en viager chaque année : les statistiques les globalisent avec les ventes classiques et les offres sur les supports d'annonces se montent à moins de 1%. Sur 600 à 630.000 ventes par an, elles n'en représenteraient que quelques milliers tout au plus ! Difficile aussi de prévoir l'impact du "prêt viager hypothécaire" créé par une récente ordonnance à l'intention des banques, absentes jusque là du financement du viager : lèvera-t-il les freins psychologiques qui limitent le passage à l'acte pour le "viager" classique, la crainte pour le vendeur de spolier ses héritiers quand il y en a, mais aussi celle de se voir servir une rente par un acquéreur qui attend sa mort pour bénéficier du bien ? La nouvelle formule est en réalité très différente et présente plusieurs avantages décisifs ! La question est surtout de savoir si elle sera proposée par les banques et à quelles conditions...
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Un objectif, deux formules
Vendre en viager relève d'abord d'un souhait du vendeur : mobiliser la propriété d'un bien immobilier pour percevoir un capital, une rente à vie, ou les deux, ce qui est le plus fréquent. En ce sens, le viager classique répond par la formule d'une vente immédiate, dont la rente viagère n'est qu'une modalité de paiement du prix !
La vente en viager "libre" est une vente en pleine propriété, qui permet à l'acquéreur de disposer pleinement du bien, comme dans une vente simple, dès la date de "jouissance" fixée à l'acte, puis le cas échéant le louer ou le vendre, le sous-acquéreur se substituant alors à lui pour le paiement de la rente...
La vente en viager "occupé" n'est pas fondamentalement de nature différente : elle ajoute simplement à ces modalités :
- soit une "réserve d'usufruit", si l'acquéreur y consent : dans ce cas l'acquéreur est, jusqu'au décès du vendeur ou de ceux sur la "tête" desquels la rente est établie, dans la situation d'un "nu-propriétaire", le vendeur étant libre d'occuper lui-même le bien, ou de le louer à sa guise, sachant que dans ce cas l'acquéreur risque de récupérer le bien occupé quand il en deviendra plein propriétaire ;
- soit - c'est le cas le plus fréquent - une réserve de simple droit d'usage : le vendeur et le cas échéant les autres personnes désignées dans l'acte (en général le conjoint) ont dans ce cas le droit d'occuper le bien jusqu'à leur mort, mais pas de le louer ; l'acte peut toutefois prévoir une majoration contractuelle de la rente au cas où ils décideraient de libérer définitivement le bien, ce qui aurait pour effet de transformer le "viager occupé" en "viager libre"...
Dans les deux cas le bien sort dès le départ du patrimoine des vendeurs, et c'est là ou le bât blesse : il est de ce fait définitivement perdu pour les héritiers !
Le "prêt viager hypothécaire" n'a pas cet inconvénient : créé par l'ordonnance du 23 mars 2006 réformant le droit des sûretés, et encore en attente du ou des décrets d'application, il est défini comme le "contrat par lequel un établissement de crédit ou un établissement financier consent à une personne physique un prêt sous forme d'un capital ou de versements périodiques, garanti par une hypothèque constituée sur un bien immobilier de l'emprunteur à usage exclusif d'habitation et dont le remboursement - principal et intérêts - ne peut être exigé qu'au décès de l'emprunteur ou bien lors de la cession ou du démembrement de la propriété de l'immeuble hypothéqué".
Pour le propriétaire du bien, le résultat en trésorerie est le même qu'en cas de viager occupé : il perçoit un capital et/ou une rente et garde la disposition du bien jusqu'à sa mort. Par contre, la nature de l'opération est toute autre : il s'agit d'un simple prêt hypothécaire ! De surcroît, le texte retient le principe du plafonnement de la dette à la valeur de l'immeuble estimée à l'échéance du terme (décès, vente ou aliénation, remboursement anticipé) ; si la dette est inférieure à la valeur de l'immeuble, la différence entre cette valeur et le montant de la créance est versée, selon le cas, à l'emprunteur ou à ses héritiers.
Surtout, ceux-ci peuvent voir le bien revenir dans la succession moyennant le désintéressement de la banque, ce qui ne manque pas d'intérêt en cas de décès précoce, ou bien en cas de forte augmentation de valeur...
Par contre, le propriétaire bénéficiaire du prêt viager garde la charge des grosses réparations et de la taxe foncière, alors que dans le cas du viager, les charges incombant normalement au nu-propriétaire incombent à l'acquéreur...
Le marché du viager : un marché d'acheteurs
Verra-t-on pour autant une ruée des propriétaires âgés vers cette formule, au détriment du viager classique, voire au delà ? Tout dépend en fait de la propension des banques à proposer ce type de prêts, et les conditions auxquelles ils les proposeront, en comparaison de celles offertes sur le marché par les investisseurs en viager !
Car si les candidats à la vente ne recourent au viager que faute de mieux, et du fait de la modicité des retraites, la formule plait indéniablement aux acquéreurs, au delà de son côté "jeu de hasard", qui fait aussi un peu de l'engouement ! Et ce au moins pour deux raisons :
- la mise de fonds sous forme de "bouquet" dépasse rarement 30% de la valeur du bien, et peut néanmoins être financée par un prêt hypothécaire,
- le reste du prix, certes aléatoire et réévalué chaque année au moyen d'un taux fixé par décret, à défaut d'échapper aux droits d'enregistrement, calculés sur la valeur en capital de la rente, échappe par contre à tout intérêt bancaire !
Les banquiers, qui, dans un premier temps, n'étaient pas preneurs de la réforme, commencent en tous cas à s'y intéresser. "Elle suscite un vif intérêt dans notre clientèle, le viager hypothécaire [pouvant] rendre de grands services à des seniors qui veulent démarrer une entreprise, aider leurs enfants ou petits-enfants ou s'assurer un complément de retraite", indiquait récemment au quotidien "Le Monde" la responsable d'un cabinet de courtage en crédits (1).
Une forte concurrence des banques avec ce prêt, si elle avait lieu, risque en fait de faire monter les enchères de la vente en viager, les professionnels spécialisés se plaignant déjà d'une inflation des conditions demandées par les vendeurs à l'incitation d'agents immobiliers moins scrupuleux, souhaitant leur arracher le mandat... Au rythme actuel de l'allongement de la durée de vie, mieux vaut pour les candidats acquéreurs de garder la tête froide !
(1) Le Monde, édition du 23 mars 2006
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