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Agents immobiliers : quelles pistes pour sortir du marasme ? Le 5/6/2002
UI - Actus - 5/6/2002 - Agents immobiliers : quelles pistes pour sortir du marasme ?
Avec une part de marché décevante - moins de la moitié des transactions passent par son intermédiaire - et une image au plus bas, la profession des agents immobiliers peine à prendre sa place dans le paysage immobilier français et à soutenir la concurrence de son principal adversaire : le particulier... Pire : rien ne semble y faire : ni l'émergence des réseaux de franchises ou de grands groupes, ni l'apparition d'Internet dont on attendait tant ! Les professionnels sont évidemment les premiers à pâtir de ce marasme, mais le client, pour qui immobilier rime souvent avec galère, est également loin d'y trouver son compte ! Faut-il désespérer de voir cette profession lui apporter enfin un service à la hauteur ? Pour la première fois depuis longtemps, une possibilité de réforme de son statut se profile : reste à savoir si elle saura saisir l'occasion !

Si les maux sont connus, les remèdes restent encore à inventer ! C'est ce qui ressort de la lecture quelque peu frustrante du rapport de Bernard Vorms, directeur général de l'ANIL, commandé par la ministre de la justice et la secrétaire d'Etat au logement au début de l'année et publié il y a peu (voir notre article précédent), qui, après un diagnostic d'une grande acuité, conclut à quelques réformes de détail, utiles certes, mais certainement pas de nature à amener en masse les clients dans les agences alors qu'ils font en général tout pour les éviter, et y réussissent au moins une fois sur deux...

Pourtant, son auteur a rencontré le ban et l'arrière ban de ceux qui comptent ou ont un mot à dire sur les professions immobilières !

C'est d'autant plus curieux que quiconque a poussé une fois dans sa vie la porte d'une agence est capable de suggérer les quatre ou cinq conditions susceptibles de faire que les prestations des agents immobiliers deviennent vraiment utiles à leur marché ! En fait le problème est qu'il faut pour les satisfaire remuer quelques montagnes :

Offrir au client (acheteur ou vendeur) un accès à tout le marché local

L'erreur commise depuis des décennies, et commise encore une fois avec l'Internet est de vouloir rassembler des fichiers à l'échelle nationale : le problème est que le client se fiche pas mal d'avoir 80.000 ou 200.000 biens en ligne s'il est obligé sur le micro-marché sur lequel en général il cherche de consulter une demi-douzaine de supports d'annonces - électroniques ou papier, de professionnels, de particuliers ou mixtes - et s'adresser en plus à une dizaine d'agences pour dénicher les affaires qui ne sont sur aucun des supports...

Le succès des "MLS (Multiple listing systems)" aux Etats-Unis que tout le monde veut à juste titre prendre pour modèle repose justement sur ce constat : prenant le contre-pied des 3615 FNAIM, ORPI, et tous ceux qui en France ont organisé des réseaux verticaux, les chambres professionnelles américaines ont organisé sur chaque marché local des fichiers inter-agences rassemblant parfois jusqu'à 90 à 95% des biens disponibles danq la zone de proximité ! Situation rêvée pour tout le monde : pour le client qui cherche, qui n'a qu'une porte à pousser pour savoir instantanément tout ce qui est offert à un instant "t", pour le vendeur ou le loueur qui n'a plus d'état d'âme pour confier son bien en exclusivité à l'un des agents puis qu'il sait que tous les autres pourront aussi le placer, et pour les agents eux-même qui ont une variété bien plus large de biens pouvant correspondre aux exigences souvent "pointues" de leurs clients !

On attribue l'incapacité quasi congénitale de monter ce type de systèmes en France par l'individualisme des professionnels et l'esprit de chapelle de leurs représentants syndicaux : c'est faux ! ce qui a tué dans l'oeuf toutes les initiatives à ce jour, c'est le trop plein de "fédérateurs" : ceux qui prétendent rassembler tout le monde sous leur bannière, en concurrence évidemment les uns avec les autres et responsables du morcellement du marché, reproduit sur les supports d'annonces quelle que soit la technologie : papier, Minitel ou aujourd'hui Internet...

Pourtant paradoxalement, c'est à partir des vieilles pratiques des "bourses immobilières" des chambres locales de la FNAIM que l'on voit poindre pour la première fois ici et là, telle l'hirondelle annonçant le printemps, des groupements d'agences d'initiative purement locale s'organisant pour la mise en commun de leurs affaires : trois ou quatre agences par ci, dix agences par là, le cas le plus spectaculaire et aussi le plus ancien est celui de Dijon où la "Bourse immobilière" regroupe une cinquantaine d'agences ! mais de nombreux autres groupements du même type s'organisent ; il semblerait même qu'un groupement important pourrait se monter sur l'Ile de France !


S'occuper aussi de celui qui cherche

C'est aujourd'hui le laissé pour compte du système ! Cela au demeurant se comprend : quand on n'a pas grand chose à lui proposer, à quoi bon l'écouter, et le relancer ? S'il trouve son bonheur, tant mieux, sinon on le laisse dans la nature...

La situation pourrait changer du tout au tout avec une mise en commun systématique de toutes les affaires d'un marché : au lieu d'user leur énergie à arracher des mandats aux mêmes clients, les agences pourraient mieux se consacrer à aider les client qui cherchent à trouver le bien qui correspond au mieux à leurs désirs mais aussi à leurs moyens...


Supprimer des pratiques génératrices de conflits

En cause notamment le "bon de visite", source "d'entourloupes" et de litiges à n'en plus finir ! Constituer la preuve de l'antériorité de la présentation d'un bien se fait bien plus sainement par la "dénonciation" du client par l'agent immobilier à son mandant - le vendeur - car elle reporte tout naturellement sur lui la responsabilité de décider s'il traite par l'intermédiaire de l'agent qui a présenté le premier l'affaire à son acquéreur, ou s'il traite par un autre canal, au risque de devoir assumer les obligations nées du mandat qu'il a lui-même signé...

Au lieu de cela, le bon de visite met la décision entre les mains de l'acquéreur, et, si celui-ci choisit de traiter autrement qu'avec l'agent qui lui a fait signer le premier bon de visite, il met le vendeur en situation d'être attaqué par cet agent alors même qu'il ignore souvent l'existence de cette première visite et encore plus souvent les implications de ce genre d'imbroglios !


Baisser et mieux partager les commissions

Le taux actuel des commissions est le reflet de la déperdition d'énergie née du "chacun pour soi" et de la pratique généralisée des mandats simples. Par ailleurs, la charge réelle de la commission pèse exclusivement sur le vendeur, l'acquéreur n'imaginant pas, vu le peu de service dont il bénéficie, mettre dans une acquisition par le biais d'une agence un centime de plus que ce qu'il mettrait s'il traitait en direct avec le vendeur !

Des agences immobilières travaillant majoritairement sur exclusivités et offrant un vrai service apprécié aux acquéreurs pourraient à la fois baisser très substantiellement leur taux de commission sans sacrifier leur rentabilité, et s'offrir le luxe de les partager réellement entre vendeur et acquéreur ! Double avantage : réduire de façon décisive le poids de la commission pour chaque contractant et facturer à chacun le service réellement rendu : de quoi rendre le "do it yourself" nettement moins attractif...

Une réforme des droits de mutation excluant la commission payée par le vendeur de l'assiette de l'enregistrement permettrait en outre d'éviter les manipulations de dernière minute - mise à la charge de l'acquéreur pour diminuer les droits - et éviterait la confusion des esprits...


Offrir une compétence minimale en immobilier

Qui n'a pas fait lui-même l'expérience du petit jeu cruel auquel s'est livré le magazine Que choisir (n°393 de mai 2002) en testant les connaissances, notamment juridiques, des collaborateurs dans 46 agences sélectionnées dans toute la France : avec des résultats à peu près identiques, à savoir qu'on raconte souvent au client n'importe quoi, mais avec aplomb !...

En cause : un recrutement à un niveau très inférieur à celui requis par la technicité et la complexité juridique croissantes du métier, pour des raisons qui tiennent probablement beaucoup à la mauvaise image du secteur (c'est le serpent qui se mord la queue...), mais aussi parce que le recrutement est exclusivement axé sur les qualités de bon vendeur exigées notamment des négociateurs !

Et aussi l'inefficience de la réglementation actuelle de l'accès à la profession : celle-ci ne fait porter les obligations de diplômes et d'expérience - par ailleurs devenues inadaptées - sur les seuls dirigeants légaux de l'entreprise et ne comporte aucune exigence concernant non seulement les négociateurs mais aussi les directeurs de succursales ! Cela convenait à une époque ou les agences se limitaient à un patron, un collaborateur et une secrétaire, mais est devenu totalement absurde quand des groupes alignent plusieurs dizaines voire centaines d'agences et des centaines de négociateurs sur le terrain...


Offrir un véritable service à valeur ajoutée

Une information rigoureuse, complète et fiable sur les biens en vente, une véritable écoute, une vraie capacité de conseil sur tous les aspects impliqués par un achat ou une vente - copropriété, fiscalité, gestion patrimoniale - et une assistance efficace dans une foule d'aspects de vie pratique impliqués par la mobilité, tels que le déménagement, les démarches administratives, la scolarisation des enfants ou la recherche de solutions de garde, la rénovation, voire l'ameublement et la décoration...

La simple énumération, non limitative, de ces services aujourd'hui non rendus permet de mesurer la distance qui sépare la planète des professionnels de celle de leurs clients, avec une excuse de taille, bien commode il faut le reconnaître : le mode de rémunération qui empêche l'agent immobilier de facturer des prestations hors la commission pour une transaction réalisée !

Cherchez l'erreur...


(Le rapport de Bernard Vorms en forme de Livre blanc "Moderniser la réglementation des activités immobilières" est consultable sur le site de l'ANIL)

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